Les richesses de la vallée au début du XIXème siècle |
Les textes ci-dessous en italiques proviennent de
mémoires appartenant aux Archives de la Compagnie de Navigation du
Dropt.
L'orthographe de l'époque a été
conservée : Drot (pour Dropt), Castillonnez (pour Castillonnès), etc... ; la
terminologie également : chemin ferré (pour empierré), etc...
Ces mémoires datent du début du 19ème siècle.
Sommaire de la page : agriculture
- vins et eaux-de-vie - industrie
- une vallée enclavée - la
forge de la Brame
Une vallée très riche ... |
Les produits de l'agriculture : |
« Les contrées qui environnent la source du Drot sont couvertes de bois et produisent abondamment des châtaignes, des noix, du maïs ; on y fabrique du charbon de bois ; on y élève de grandes quantités de porcs et de volailles qui sont vendues à Bordeaux. A partir de Monpazier, les productions continuent à être les mêmes. « Vers Villeréal, on trouve encore des châtaignes, puis les blés, les céréales, quelques vins communs, le bois de chêne propre au merrain et à la construction ; les écorces pour les tanneries remplacent les productions précédentes. Les prunes d’ente sont aussi un objet d’une haute importance, principalement pour tout le pays qui s’étend entre la ville dont nous parlons et Monflanquin, située sur la rive gauche du Drot. |
« A Castillonnez, les productions principales sont les vins, les blés, le chanvre et les prunes d’ente. Les blés de Castillonnez et des environs sont d’une qualité tout à fait supérieure ; les quantités qui s’exportent se rendent sur le Lot où on les transforme en minots pour Bordeaux et les colonies. En venant vers Eymet, la rive gauche continue les produits de Castillonnez.
« Les chanvres prennent aussi une part assez large dans les récoltes à partir d’Eymet ; ils sont en général d’une belle venue, jaunes, soyeux, et propres principalement au tissage de toiles et de coutils. Les colzas commencent aussi à devenir une culture importante sur le Drot et le produit des terres ensemencées de cette façon est trop avantageux pour que la récolte en ce genre n’augmente pas chaque année.
« Sur les deux rives en partant de Duras, les productions principales sont les blés, les chanvres, les mêmes grains et le foin qui croît dans la vallée du Drot.
Les vins et eaux-de-vie : |
« Les vins rouges de la rive droite, depuis Monpazier jusqu’à Eymet, sont corsés, se conservent vieux, et ont même en quelques endroits une sève agréable. La rive droite produit encore des vins blancs doux estimés ; ceux de Castillonnez sont connus dans le commerce. Ils viennent par Bergerac, ainsi que ceux d’Issigeac qui leur sont infiniment supérieurs et qui conservent en vieillissant une partie de leur douceur et un goût piquant qui les rend agréables à boire.
« La rive gauche produit des vins communs, propres à la consommation des cabarets, et qui pourraient avantageusement remplacer les vins du Haut-Pays auxquels ils ressemblent, sauf le goût de terroir qui n’existe pas dans les vins du Drot. En venant vers Eymet, la rive gauche continue ces vins, sauf la qualité, qui pour la plupart les rend propres à faire de l'eau-de-vie.
« Depuis Lauzun surtout, et jusqu’à Monségur, toute cette rive produit des quantités considérables d’eau-de-vie, qui se dirigent vers Marmande où elles s’expédient sous le nom de cette ville pour Bordeaux et les ports de France et de l’étranger.
« Depuis Eymet et en descendant, la rive droite continue à produire d’excellents vins blancs, parmi lesquels ceux de Soumensac tiennent le premier rang. C’est dans l’espace qui s’étend de la Dordogne au Drot que se récolte une grande partie des vins connus dans le commerce sous le nom de vin blanc doux de Sainte-Foy.
« Les vins deviennent communs sur les deux rives en partant de Duras. Cependant on trouve encore quelques vins rouges assez bons, et parmi eux on distingue ceux de la commune de Dieulivol ; mais en général les vins des deux rives sont plutôt propres à être convertis en eaux-de-vie.
Les produits de l'industrie : |
« A partir de Monpazier, on trouve d’excellentes carrières de pierre meulière et une carrière de plâtre. Le terrain devient abondant en minerai de fer, faiblement exploité jusqu’à ce jour faute de moyens de transport suffisants.
« Au dessus de Villeréal, on trouve la forge de La Brame, située sur le Drot qui lui sert de moteur. Cette usine est entourée de terrains abondant en minerai de fer et pourrait facilement augmenter sa production qui s’élève pour l’instant à 9 000 quintaux de fonte et 3 000 quintaux de fer.
« La chute de Brétou, placée immédiatement au-dessus de la ville d’Eymet, alimente une filature de coton.
« Une fabrique d’huile de lin de peu d’importance existe sur la chute de Bagas . Il y a en outre dans le pays plusieurs fabriques d’huile de noix et de colza qui servent à alimenter la consommation locale.
« Le tissage des toiles de chanvre occupe un grand nombre d’ouvriers tisserands et les foires de Miramont sont renommées dans tous les environs pour la vente des fils et des tissus de cette espèce.
« A Camiran se trouvent d’importantes fabriques de briques, tuiles et carreaux qui sont estimés à Bordeaux les meilleurs du département. Les chaux hydrauliques de Camiran sont aussi très renommées pour tous les ouvrages à élever dans l’eau ; elles ont été employées à la construction du pont de Bordeaux.
... mais une vallée enclavée |
« Une des causes qui contribuent à paralyser l’activité commerciale et industrielle sur les bords du Drot, c’est le défaut de chemins viables dans un terrain en général gras et argileux, où les routes de terre sont rompues et impraticables après quelques jours de pluie .
« Toute la contrée que baigne le Drot semble avoir été oubliée dans le tracé des routes royales et départementales. Et, sauf la route royale de Périgueux à Agen, qui, entre Bergerac et Villeneuve, passe le Drot sur le pont de Cauze, 2,000 mètres environ avant de traverser Castillonnez, il n’y a pas un seul chemin ferré dans le pays .
« Les chemins qui peuvent conduire à Marmande sur la Garonne ou à Bergerac sur la Dordogne, leur débouché naturel et nécessaire, sont à peine tracés sur un terrain gras, argileux, montueux, et plein d’excavations dangereuses, même pour les gens à cheval. Pendant tout l’hiver et une partie de l’automne et du printemps, il faut atteler à une charrette chargée d’une pièce d’eau-de-vie, jusqu’à trois paires de bœufs ou de vaches élevées au trait, et de nombreux accidents obligent même souvent à renoncer à ce moyen dangereux et ruineux.»
« L’exportation vers Bordeaux , et de là vers les colonies et le reste de l’ Europe, se fait essentiellement par les ports de Bergerac et Marmande, également par Sainte – Foy pour la rive droite de la basse vallée. Le transport des richesses de la vallée vers ces ports est long, difficile, et donc très coûteux.
« Castillonnès sur la route royale Périgueux – Bergerac – Villeneuve d’Agen – Agen bénéficie pour un temps encore d’une position exceptionnelle car il n’existe pas de route longitudinale et la route royale Bergerac – Marmande par Eymet est seulement en cours d’achèvement.
La forge de la Brame |
En haute vallée du Dropt, la nature du sol (terrains
sidérolithiques, riches en minerai de fer), des forêts étendues (source de
charbon de bois), une rivière (le Dropt), ont été des éléments favorables
à une industrie de la fonte et du fer.
Il y aurait eu de nombreuses forges
au 16ème siècle dans la juridiction de Villeréal (Parranquet,
peut-être Tourliac et Rayet). On est sûr par contre de l'existence jusqu'au
19ème siècle des forges de la Brame et de la Vaysse (aujourd'hui commune de
Vergt-de-Biron).
En l'An II, le Conventionnel Lakanal,
en mission en Dordogne et Lot-et-Garonne, décrète la réquisition sur place
des ouvriers de la forge (ainsi non soumis à la conscription) afin de consacrer
toutes les ressources du pays à l'effort de guerre. La fonte non ouvrée,
destinée à la Marine, est expédiée par le port fluvial de Libos (sur le Lot).
Le 1er avril 1820, Jean-Baptiste de
Laulanié, maître de forges, demande la conservation de son usine de la Brame
et le transfert du "feu d'affinerie" de la Vaysse à l'usine de la
Brame. Ce projet prévoit que l'usine de la Brame sera constituée d'un
haut-fourneau et d'une
forge catalane pouvant servir au besoin comme affinerie
ordinaire.
La production annoncée devait être
de 100 à 125 tonnes de "fers de diverses espèces" pour 400 tonnes de
minerai et 800 tonnes de charbon de bois provenant de 4 000
brasses de bois.
A ce projet étaient joints les plans des différentes parties de
l'usine (voir ci-dessous). Un arrêté préfectoral autorisera cette
restructuration.
Les images
de l'usine ont été transformées en miniatures.
Curseur sur une miniature : affichage de la légende de la photo et de la
taille
de son fichier
Clic sur une miniature : visualisation en taille normale ("affichage plein
écran" de préférence)
Cette usine présente quelques caractéristiques intéressantes :
possibilité d'un affinage sur place de la fonte grâce à la forge catalane associée au haut-fourneau
soufflets actionnés par un arbre à cames solidaire d'une roue à aubes d'axe horizontal placée sur un bras du Dropt
présence d'un moulin à farine qui permet d'utiliser la totalité de la puissance
motrice disponible du fait du barrage en amont
Les vestiges de ces installations ont été longtemps visibles. Ils ont pratiquement disparu aujourd'hui.